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C’est pas des arêtes, c’est des os

11 Juin 2019 , Rédigé par Agnan KROICHVILI Publié dans #archéologie, #Lyon, #souterrain, #CroixRousse, #GalloRomain, #Lugdunum, #textes 2019, #VerbeIncarné

C’est pas des arêtes, c’est des os

C’est pas des arêtes, c’est des os.                                                                          11 juin 2019

 

Une expression populaire en titre pour une hypothèse concernant les souterrains antiques de la Croix-Rousse à Lyon quelque peu provocatrice ne remettant pas en cause la structure même de la construction que l’on aurait pu dire également en fougères mais qui du fait de son dédale nous apparait plus comme un squelette avec ces os longs et ces os courts, ce qui nous amène à ce jeu de mots, d’autant que plusieurs squelettes  y furent découverts et que visiblement il y a un os concernant leur fonction.

Il y a déjà quelque temps que j’avais déjà entendu parler de ces « souterrains ».Mon attention en avait été captée par la connaissance de « puits » sur le site du Verbe Incarné d’environ 4 x 4 m creusés dans le lœss.  Nous étions alors dans le cadre d’une fouille de sauvetage et l’instabilité du sol écarta dès lors toute investigation.  Leur forme en tous cas différait des habituelles fosses d’extraction. Je ne sais pas si lors du décaissement du site avant les futurs immeubles des observations ont été réalisées.

Pour avoir été l’inventeur d’une structure peu habituelle sur ce même site à Lyon qui fit déjà couler beaucoup d’encre, je veux parler des fossés du Verbe Incarné, vous comprendrez mieux encore mon attention. Sachant que cette même trouvaille, première trace tangible d’une occupation antérieure à l’urbanisation, inaugura de nombreuses découvertes qui ont largement modifié dès lors la perception que nous avions de la création de cette colonie, sur la colline de Fourvière.

À première vue j’avais cru comprendre pour ce qui concerne la Croix-Rousse que nous avions là plusieurs souterrains et n’ayant à l’époque aucune vison de leur plan j’imaginais qu’il pouvait s’agir de plusieurs  collecteurs de différentes périodes sans aucune cohésion entre eux et restais très prudent quant à leur interprétation qui déjà appelait à une étude approfondie.

Les méandres des réseaux sociaux ont dernièrement réactivé ma curiosité, là aussi un dédale pour en connaitre l’origine, tout part d’un tweet de Jean-Paul Demoule citant un article en référence de Djemila Fellague et de fil en aiguille je prends connaissance à la fois des thèses de Walid Nazim auxquelles  je n’adhère pas mais qui aura le mérite d’avoir remis sur le devant de l’actualité ces galeries.

Une émission sur France culture, des vidéos, un film même et plus récemment un article dans le journal  La croix et une dépêche  AFP ramènent  ainsi le sujet sur le devant de la scène. Ce qui me valut déjà dès  le 3 juin un réveil aux aurores pour une première rédaction et puis la journée d’hier encore pour le titre que les mots d’aujourd’hui  enfin  accompagnent  par une réactivation suite au tweet des Archives de Lyon concernant la découverte du gros caillou, quasi à l’aplomb de cet autre caillou qu’est le gardien des souterrains.

 

Une datation du XVI ème siècle fut proposée dans un premier temps par le service archéologique de la ville de Lyon en 2008, puis plus récemment une datation au carbone 14 nous ramène à une édification au début de notre ère. Ce qui ne m’étonna guère au vu des images que j’ai pu visionner et pour avoir parcouru le grand collecteur du site du verbe incarné et fait une reconnaissance dans les collecteurs du site de Saint Romain en Gal.  Les joints au fer par ailleurs très caractéristiques ainsi que les traces de coffrage étant en tous points comparables aux structures de cette même époque. L’absence de mortier de tuileau et de concrétions calcaires élément objectif repoussant toute hypothèse d’adduction ou tout autre système hydraulique, il n’en reste pas moins que je fus surpris par le fait d’écarter une fonction liée à un système de soutènement, aucun argument ne venant l’étayer.

Ce qui retint également mon attention au vu des vues reconstituant la structure en trois D, c’est l’étagement et les différents paliers, ceux-ci m’évoquant bien évidemment le creusement des terrasses  pour la construction des maisons sur le site du Verbe Incarné. Dès lors je me posais le problème de leur construction et je reste étonné que celui-ci ne soit pas encore abordé à ma connaissance donc divulgué. Certes les éléments qui suivent n’apporteront pas d’élément supplémentaire quant  à l’interprétation de leur fonction future mais ils auront le mérite d’aborder le sujet sur un autre angle et par expérience je sais qu’il n’y a rien de plus périlleux que de s’en tenir à une perception au présent de vestiges du passé et de chercher bien avant leur compréhension des similitudes et des comparaisons avec l’existant identifié.

Par exemple, effectivement lorsque l’on a des escaliers c’est pour descendre, mais un dénivellement du terrain peut  imposer une telle structure et nous n’avons donc pas nécessairement un cryptoportique pour rétablir le niveau. La création d’une terrasse peut également en  permettre l’aménagement, ce que j’ai pu démontrer pour la maison des Dieux Océan à Saint-Romain-en-Gal. De même lorsqu’on a des structures qui s’apparentent à des puits et des galeries aujourd’hui souterraines  nous n’avons pas forcément une construction qui fut bâtie dans ces mêmes conditions, c'est-à-dire sous terre. Leur découverte et leur exploration se fait, elle, en ces termes, nous partons bien du présent, mais qu’en est-il de leur édification ? N’y a-t-il pas un risque à prendre le problème par le haut ? N’est-il pas préférable de le prendre à la racine, à la base ?

Et effectivement c’est là que repose l’hypothèse, à aucun moment je n’ai trouvé d’élément concernant leur construction si ce n’est l’évocation des dimensions de la largeur des galeries 1.90m et la longueur des coffrages tous les 0.80 m observables dans l’intrados pour la construction du voûtement. À moins d’une méconnaissance de ma part, ce que je ne peux écarter, je ne vois pas comment un tel voûtement peut-être réalisé dans de telles conditions. L’idée de creusement de galeries suffisamment  larges pour permettre l’élévation des pieds droits de la structure mais aussi d’un surcreusement en hauteur afin de pouvoir par bourrage remplir la voûte, l’extrados, me parait fort hasardeuse. Ces galeries n’ont-elles pas été faites à ciel ouvert ? Comme nous le connaissons pour les collecteurs d’eau. Ne pouvons nous pas émettre l’hypothèse d’une construction dont  le départ se serait fait à  flanc de colline en vue de l’aménagement d’un plateau ou de son remodelage avec une fonction première purement architectonique de la même manière qu’un cryptoportique avec des galeries jouant alors  ce rôle, ce qui expliquerait cette structure en arête de poisson afin de couvrir et d’étayer une large surface ? Il semblerait que l’aménagement avec des murs de terrasse avec arc de décharge n’aurait pas suffit au vu des conditions de travail et de l’espace requis pour cette nouvelle édification.

Nous ne pouvons pas écarter par ailleurs que cet aménagement fasse suite à un éboulement de la colline  et dans ce cas là cet agencement aurait été des plus périlleux si celui-ci s’était fait par le haut dans un terrain instable. Un creusement dans la molasse n’étant pas plus inimaginable en souterrain qu’en tranchée large, le fait que des galeries butent ou s’arrêtent  à l’aplomb n’implique pas forcément un arrêt, de même pour la partie où l’on rencontre le granit que l’on pense avoir été évité, il peut s’agir du départ, d’un ancrage non d’un contournement tout dépend comment on se place. Pour ce qui concerne les puits qui dans les hypothèses actuelles auraient permis d’orienter le travail, nous pouvons également supposer qu’ils jouent le rôle de cheminée pour l’aération, bien qu’ils aient pu servir aussi pour la circulation et la manutention. Il reste que nous avons ainsi un aménagement à flanc de colline et à ciel ouvert avec l’édification d’un premier réseau remblayé après construction avec les remblais provenant du creusement du second étage et ainsi de suite avec à chaque fois un aplanissement en terrasses, l’étagement de ces mêmes galeries s’expliquant par une économie de travail afin de diminuer le surcreusement qu’aurait nécessité des galeries sur un seul et même niveau, c’est ainsi que nous pouvons parler d’une ossature répondant à un aménagement de soutènement pour un édifice qui reste à identifier. Notons que cela n’exclut en rien d’autres utilisations ultérieures.

 

 

Bien que retiré du monde de l’archéologie depuis 1989, j’espère que cette hypothèse attirera votre attention malgré son caractère non universitaire, ni littéraire ce qui fut mon handicap mais qui ne m’empêche pas moins d’apporter ma contribution à cette réflexion. Il s’agit là d’une esquisse qui demande à être affinée, je fais confiance à la communauté scientifique pour en confirmer ou en infirmer la validité et à pousser plus loin les recherches

 

 

 

 

 

 

-Dans les entrailles de Lyon, le mystère des "arêtes de poisson" journal  La Croix

afp, le 31/05/2019 à 10:36 Modifié le 31/05/2019 à 10:45 https://www.la-croix.com/Culture/entrailles-Lyon-mystere-aretes-poisson-2019-05-31-1301025778?from_univers=lacroix

-Émission de France Culture -https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/histoire-de-lyon-24-les-aretes-de-poisson-un-mystere-sous-la-croix-rousse

- D. Fellague, « Les souterrains antiques de la Croix-Rousse à Lyon. De la quête ésotérique à l’enquête archéologique », Archéologia, n° 556, juillet-août 2017. https://www.academia.edu/33676940/D._Fellague_Les_souterrains_antiques_de_la_Croix-Rousse_%C3%A0_Lyon._De_la_qu%C3%AAte_%C3%A9sot%C3%A9rique_%C3%A0_l_enqu%C3%AAte_arch%C3%A9ologique_Arch%C3%A9ologia_n_556_juillet-ao%C3%BBt_2017

-LES SOUTERRAINS DE LACROIX-R OUSSE DENOMMES LES ARRETES DEPOISSON,LYON©D.FELLAGUE https://www.academia.edu/38238665/arre_tes_de_Poisson_Fellague.pdf D. Fellague, 28 janv. 2019

 

-LES ARÊTES DE POISSON : ÉLÉMENTS DE DISCUSSION SUR LA CONSTRUCTION D’UN OUVRAGE ANTIQUE ATYPIQUE Emmanuel Bernot et Stéphane Gaiillot (SAVL)  https://chantiers.hypotheses.org/849

-LES ARÊTES DE POISSON : UNE PERPÉTUELLE REDÉCOUVERTE Emmanuel Bernot et Stéphane Gaiillot (SAVL) https://chantiers.hypotheses.org/854

- L'énigme des arêtes de poisson Walid Nazim     http://aretesdepoisson.free.fr/  

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