Le dormeur du camp

Le dormeur du camp        01/04/2008 4h44

Il est étendu là sur son brancard

Les yeux ouverts, le corps ceinturé par deux reprises.

On dit pourtant qu’on ne meurt qu’une fois

Cette jeunesse là, bien portante,

Par deux fois, y laissa sa peau

Bien des rêves sacrifiés, bien des vies perdues pour la mère Patrie.

Bien sûr, il y eut des guerres avant

Puis après plus près de nous

Mais cet hommage-là circonscrit dans le temps,

Il s’agit de le rendre aux petits gars du camp

Originaires de bien des régions de France

Cantonnés ici pour faire leurs armes

Ici à Sathonay Camp

Et qui partiront sur les mêmes champs de bataille que leurs conscrits

Durant ces deux guerres mondiales.

Pour beaucoup leurs corps ne revinrent même pas

Sur la terre de leur berceau

Seuls leurs noms figurent sur le registre

Et le monument de la commune de résidence

Prévenue parfois plus tard de leur décès.

Notre mémoire s’étiole

À ne voir que quelques noms pour chaque guerre

Dans chaque village

C’est comme ça que l’on meurt deux fois.

Un monument pour chaque camp

Chaque caserne, chaque régiment

Serait bien plus saisissant

Reconstituant l’intégralité de ses appelés

Morts pour la France, morts pour leurs proches, morts pour eux.

De ces lourdes pertes

Dont on complète encore l’inventaire

Il n’y aura plus de soldat inconnu,

Ce travail de mémoire achevé.

On pourra alors peut-être reconstruire

En cet endroit endormi maintenant

Là où certains durent abandonner leurs racines

Pour avoir eu le malheur en tout honneur

De figurer en cette époque sur la liste.